dimanche 12 décembre 2021

Bicentenaire de la naissance de Flaubert : les frasques de Gustave à Istanbul

 Article publié le 12 décembre 2021 dans le Petit Journal d'Istanbul

https://lepetitjournal.com/istanbul/communaute/bicentenaire-flaubert-les-frasques-de-gustave-istanbul-326792

Né le 12 décembre 1821 à Rouen, Gustave Flaubert, comme de nombreux écrivains de cette époque, est animé dès l’enfance par le désir de partir en Orient. C’est l’année de ses vingt-huit ans qu’il réalise son rêve, car, si le voyage en Orient faisait partie de ses grands mythes personnels, il obéit aussi à une nécessité plus profonde. Flaubert a perdu son père, sa sœur, son meilleur ami, son livre La Tentation de Saint-Antoine a été jugé impubliable et il vient de vivre une rupture douloureuse avec sa maîtresse, « la Muse », Louise Colet. « J’ai en moi, au fond de moi, un embêtement radical, intime, âcre et incessant, qui m’empêche de rien goûter et qui me remplit l’âme à la faire crever », se plaint-il en 1846. C’est pourquoi, au grand dam de sa mère, avec laquelle il vit, il décide, pour oublier, de partir avec Maxime du Camp :  « Je vais faire un voyage dans tout l’Orient. J’étais né pour y vivre… » écrit-il peu avant son départ.


Après avoir traversé l’Egypte, la Palestine, le Liban et la Syrie, Flaubert arrive à Istanbul le 13 novembre 1849 et, d’après son journal, y reste jusqu’au 16 décembre. Ses visites touristiques suivent les sentiers battus des voyageurs français dont il a lu les récits : derviches hurleurs de Scutari, derviches tourneurs de Galata, Eaux-Douces d’Asie, grandes mosquées d’Istanbul, spectacles en français, séances de narguilé, voyage en caïque à la résidence d’été des ambassadeurs de France à Tarabya, où il fait d’ailleurs connaissance avec le général Aupick, le détesté beau-père de Charles Baudelaire.

             La résidence d'été des ambassadeurs de France à Therapia (aujourd'hui, Tarabya)

Mais s’il aime les cimetières dans lesquels il se promène à cheval, trouve « charmante » la mosquée de Soliman et s’extasie sur les murailles de Constantinople, « les murailles de Constantinople ne sont pas assez vantées, c’est énorme ! », peu de lieux  trouvent vraiment grâce à ses yeux. Il décrit Sainte-Sophie comme un « amalgame disgracieux de bâtiments » et le palais de Topkapi comme un magasin de brocante : « c’est enfantin et  caduc, on y sent l’influence de je ne sais quel Versailles éloigné, apporté là par je ne sais quel ambassadeur à perruque. »


Constantinople au XIXe siècle...

 En réalité, les sites touristiques ne sont pas ce qui intéresse le plus Flaubert. La lecture en parallèle de son journal et de ses lettres est édifiante car il ne raconte pas dans le premier -dont il destine peut-être la lecture à de tierces personnes-, ce qu’il confie dans ses missives à son ami intime, Louis Bouilhet. Les lettres montrent que, comme dans les autres pays qu’il a traversés, Flaubert cherche surtout à se perdre dans les bas-fonds de Constantinople, pour s’y encanailler le plus possible, en écumant tous les bouges de Galata, alors quartier des maisons closes.

Ce qu’il raconte est choquant pour une sensibilité moderne car, bien que fils de médecin ayant grandi dans l’hôpital de Rouen, il n’hésite pas à avoir des relations sexuelles avec des filles de quinze ans sans jamais de soucier de leur transmettre sa syphilis - il décrit soigneusement l’évolution de ses chancres-, ou d’assister à d’équivoques spectacles de danse du ventre donnés, selon sa propre expression, par des « bambins » travestis ; comme si le fait de se trouver loin de sa Normandie natale rendait licite ce qui ne l’était pas dans son propre pays. On sait bien que littérature et morale n’ont jamais fait bon ménage… mais ses écrits d’Orient couraient aujourd’hui le risque d’être frappés d’anathème…

En ce qui concerne les femmes turques, Flaubert est fasciné par leur beauté sous le voile. « Comme leurs yeux brillent ! » dit-il et il aimerait bien « vivre avec une odalisque ravie ». En bon misogyne de son époque, il n’hésite pas à écrire : « Dans cent ans, le harem sera aboli en Orient, l’exemple des femmes européennes est contagieux, un de ces jours, elles vont se mettre à lire des romans. 
Adieu, la tranquillité turque ! »…




mardi 7 décembre 2021

Le paradis de George Sand à Nohant : du jardin au jardin secret…

 Article publié dans la revue Salut ça va de l'université de Blagovechtchensk, en juin 2021

Lien : https://aefra.files.wordpress.com/2021/07/juin-2021.pdf

Aurore Dupin de Francueil, baronne Dudevant, plus connue sous le pseudonyme de George Sand, est sans doute la première écrivaine à avoir consacré tant de pages à célébrer sa passion des jardins.

                                                      Portrait par Thomas Sully en 1926

Portrait par Charpentier vers 1837

En effet, c’est dans le domaine de Nohant, dans le Berry,  où elle vit dès l’âge de quatre ans aux côtés de sa grand-mère, Marie-Aurore de Saxe, qu’elle va découvrir l’amour de la nature, si cher aux auteurs du Romantisme. « Je vivais libre, heureuse… couverte de terre », dira-t-elle en parlant de son enfance. Cet aspect de sa personnalité, occulté par le tumulte de ses multiples liaisons amoureuses ou par le scandale de Lélia, qui aborde pour la première fois le sujet de la sexualité féminine, est pourtant essentiel pour la compréhension de son œuvre.


                                                                    Nohant en 1864

Car le domaine de Nohant et son jardin deviendront vite la métonymie de sa lutte pour son émancipation. Elle hérite de Nohant à dix-sept ans, à la mort de sa grand-mère ; elle y commence sa vie d’épouse avec Casimir Dudevant, mais bien vite, lui impose un mode de vie séparé une partie de l’année, « pour écrire ». C’est à Nohant qu’elle rédige en 1832, sur un bureau de fortune fait d’une planche clouée dans un placard, son premier grand succès littéraire, le roman Indiana, dont les ventes lui permettent de conquérir son indépendance financière et d’imposer son statut de femme-autrice. Enfin, après ses amours tumultueuses avec Alfred de Musset et sa difficile séparation légale d’avec son époux -à son époque, le divorce est interdit et elle doit aussi lutter pour reprendre tous ses droits légaux sur Nohant- c’est là qu’elle revient s’installer avec ses enfants en 1837, à l’âge de trente-trois ans, pour se mettre à « cultiver son jardin » et composer une œuvre immense, parfois injustement oubliée, comportant soixante-dix romans, des essais, des pièces de théâtre et divers articles.

                                                          Photo Maison Geroge Sand

C’est aussi là qu’elle va trouver le bonheur au jardin : « Je travaille à la terre quatre ou cinq heures par jour avec une passion d’abruti et j’ai fait un jardin à ma fantaisie dans mon petit bois »…  Paroles surprenantes, à cette époque, sous la plume d’une femme d’origine aristocratique…

Un jardin pour rêver

Le jardin de Nohant comporte environ cinq hectares mais il reflète le monde intérieur de l’écrivaine. Tout d’abord,  devant la maison se tient une cour d’honneur avec des massifs de fleurs et d’arbustes. Puis, vers l’est de la bâtisse, il comporte d’une part, un potager avec une serre, un puits et un atelier, et de l’autre, un verger. Au-delà du verger s’étendent des prairies et un bois tapissé de mousse, composé d’érables, de frênes, de tilleuls et de lilas, où se trouve une petite île et une maisonnette surnommée « le Pavillon Flaubert », où logeaient les invités souhaitant préserver leur indépendance.

Photo des Monuments nationaux

En effet, Georges Sand reçoit beaucoup et fait déguster à ses amis les produits de son domaine. Sa liberté et son modernisme ne l’empêchent pas d’endosser à la perfection le rôle de maîtresse de maison, elle est une excellente cuisinière et affirme adorer les « soins domestiques.»

Pour embellir son jardin, George Sand, passionnée par les sciences naturelles, effectue des recherches en botanique, apprenant même le nom latin des plantes et confectionnant des herbiers. On sait qu’elle cultive une multitude de fleurs, comme l’atteste sa correspondance :   « Bouquet cueilli au jardin : roses du Bengale, roses thé blanches et couleur de chair, réséda, giroflée double violette, une scabieuse…violettes, roses noisettes, verveine, valériane, mufliers, primevères, pervenches dans le bois, une dernière rose trémière, laurier-thym, fleurs de fraisier caperon, feuilles de lierre nuancées de rouge et de jaune… », écrit-elle le 18 décembre 1852.


Photo Berry Province

Mais surtout, ses recherches lui permettent de devenir une jardinière moderne, car elle a planté sur sa terre plus de cents espèces importées et même des plantes exotiques qu’elle essaye d’acclimater en recréant leur milieu d’origine. En 1851, lorsqu’elle fait installer le calorifère dans sa demeure, elle en profite pour chauffer sa serre, ce qui lui permet de cultiver des orangers et même des ananas. Sa conscience écologique est si développée que certains de ses textes pourraient avoir été écrits aujourd’hui. A l’instar des Romantiques, George Sand n’est pas attirée par les jardins trop disciplinés, elle affectionne « le jardin anglais », proche de la nature. Pour elle, le jardin doit être sauvage et propice à la rêverie, elle laisse se développer les plantes « indépendantes, qui ne se plient pas à nos exigences » et passe de longs moments à se promener dans son bois où poussent les herbes folles. Son jardin est si beau qu’en 1840, Delacroix l’a immortalisé dans le tableau, Le Jardin de George Sand à Nohant.



Le plaisir de jardiner

Grande lectrice de Rousseau, George Sand effectue en 1863, le pèlerinage aux Charmettes, la maison où Rousseau demeura avec Madame de Warens, celle où il connut « le court bonheur de [sa] vie », en s’adonnant aux joies du jardinage. Aux Charmettes, George Sand est si émue qu’il lui semble éprouver le phénomène de la réminiscence. Elle se sent en parfaite communication avec son illustre prédécesseur ; comme lui, elle va « vivre dans la nature ».



Nous connaissons très bien l’emploi du temps de George Sand, d’après son autobiographie Histoire de ma vie, mais surtout par sa correspondance, ses nombreux agendas et aussi par le journal tenu par son dernier compagnon, Alexandre Manceau, qui, à partir de 1852, raconte tout ce que fait celle qu’il nomme « Madame ». Ces témoignages montrent qu’elle consacre quotidiennement une grande partie de son temps au jardin ; selon sa propre expression, c’est « avec fureur » qu’elle jardine. « Je sème, je plante, je fume mes plates-bandes, je fais des massifs, j’enfonce des pieux, je relève des murs, je fais venir de la terre légère d’une demie-lieue. Je suis en sabots toute la journée et ne rentre que pour dîner », explique-t-elle.


Photo du site Mon carnet George Sand

L’inspiration au jardin

La jardin va bien vite constituer une source d’inspiration pour l’écriture. Car c’est en se livrant à ses travaux bucoliques qu’elle conçoit de nouveaux projets littéraires : « Je travaille donc moins longtemps le papier mais plus vite et avec plus de facilité. » A certains moments, elle en vient même à penser qu’elle éprouve « plus de plaisir à jardiner qu’à écrire ». L’imagination se déploie dans la nature autant que sur la feuille de papier. « Il y a des heures où je m’échappe de moi, où je vis dans une plante, où je me sens herbe, oiseau, cime d’arbre, nuage, eau courante, horizon, couleur, formes et sensations changeantes, mobiles, indéfinies… »,  écrit-elle en 1873, trois ans avant sa mort.

Photographie par Nadar

Au fil des ans, même l’intérieur de sa maison est peu à peu devenu comme un prolongement ou un reflet de son jardin : « Souvent, je dors dans un hamac. Mes livres, mes herbiers, mes boîtes à papillons, mes cailloux, encombrent la pièce et un petit panneau qui s’encastre dans la boiserie me sert de secrétaire. Tout mon univers est là. » Cette inspiration apportée par la nature fait d’elle un des seuls écrivains à avoir choisi le monde rural comme sujet favori de leur œuvre. Elle dédie le premier de ses « romans champêtres », Jeanne, à une paysanne travaillant chez elle comme servante. Elle est la première à prouver que les paysans peuvent devenir des héros de romans ; l’amour de la nature la conduit progressivement à un engagement social et politique idéaliste…

En définitive, George Sand ne quittera jamais son jardin puisqu’elle y repose pour l’éternité dans le petit cimetière familial. L’article du Figaro publié après son enterrement écrit, en guise d’épitaphe  : « Elle dormira, calme et respectée, au pied du mur de son cher jardin de Nohant, témoin de ses premiers pas et de ses dernières promenades, au milieu de ces paysans amis dont elle a été la bienfaitrice et dans son Berry bien-aimé, dont elle sera la gloire… »



Sources pour cette article, bibliographie :

- Michelle Perrot, George Sand à Nohant. Une maison d’artiste, Paris, Éditions du Seuil, 2018.

-Christiane Sand, Le Jardin romantique de George Sand, Albin Michel, 1995.

 -France culture : George Sand, vie singulière d’une auteure majuscule, par Delphine Saltel, 2.08.2017.

-Jardins de France n. 656, « Jardins d’écrivains, jardins d’artistes » : A Nohant, le jardin de George Sand , par Sylvie Jehl, 2019.

-Site « Mon carnet George Sand » : https://moncarnetgeorgesand.fr/


jeudi 21 octobre 2021

Né le 21 octobre : Lamartine, un amoureux de la Turquie…

 


Alphonse de Lamartine est venu deux fois en Turquie. La première fois en 1833, à la fin de son « grand tour » en Orient, où, réfugié dans un « yali » de Buyukdere pour s’adonner au chagrin causé par la mort de sa fille Julia, il n’en éprouva pas moins un « coup de foudre » pour la Turquie. La deuxième fois en 1850, lorsque, déçu par  son échec aux élections présidentielles, il décida de se mettre au service du sultan, qui finit par lui octroyer un immense domaine dans les environs de Tiré. Mais bien vite, faute d’argent, Lamartine réalisa qu’il serait incapable d’exploiter les terres et dut renoncer à ce que ses adversaires nommaient ses « châteaux en Orient ».


« Si je n’avais qu’un seul regard à poser sur le monde, ce serait sur Istanbul… »

Saisi par sa détresse, le sultan mit les terres en location et lui en versa la rente jusqu’à la fin de sa vie. Pour remercier son bienfaiteur, Lamartine entreprit alors la rédaction de son immense « Histoire de la Turquie ». Il devint aussi une sorte de galérien de l’écriture, obligé, jusqu’à son dernier souffle, d’écrire sur commande pour gagner sa vie…

L’histoire de Lamartine en Turquie fait l’objet du second chapitre de Secrets d’Istanbul (troisième tome de La Trilogie d’Istanbul) : Le Palais mystique de Sabattaï Tsevi, La Principauté d’Alphonse de Lamartine, Les Phares du Bosphore de Michel Pacha, L’Œuvre perdue de Pierre Désiré Guillemet…

Couverture de l'ancienne édition
Couverture de la première édition

Couverture de la nouvelle édition


Lien sur ma vidéo, Lamartine en Turquie : 


https://www.youtube.com/watch?v=cx3IyPu-5K4

dimanche 30 mai 2021

Marie Le Jars de Gournay, celle qui voulait vivre de sa plume...

 Article publié dans la revue Salut ça va de l'université de Blagovechtchensk, en mars 2021

Lien https://aefra.files.wordpress.com/2021/04/mars-2021-1.pdf?fbclid=IwAR0kY0TRp1G-JPwwT3EtdLtVBUipY9tuo9gZ5yNC--gffKkuOCaZFGjPDoE

Pendant longtemps, Marie Le Jars de Gournay (1565-1645) n’a été connue que pour avoir réalisé l’édition posthume des Essais, de Michel de Montaigne. Pourtant, la redécouverte et la publication d’une partie de ses œuvres ont montré qu’elle était une femme hors du commun et, incontestablement, une des premières féministes françaises.



Née dans la petite aristocratie de Picardie, où elle grandit au château de Gournay, aînée d’une famille de six enfants, Marie refuse très tôt de suivre la voie tracée aux filles de son époque,  la préparation du trousseau et le mariage. Au contraire, dès son plus jeune âge, elle manifeste du goût pour la lecture et la littérature, au point d’apprendre toute seule le latin. Elle refuse de n’être qu’une « quenouille », métonymie par laquelle on désignait alors les femmes.





Lorsque, l’année de ses dix-huit ans, elle découvre les Essais de Michel de Montaigne, elle est tellement envoûtée par l’œuvre qu’elle ne rêve plus que de rencontrer l’homme, vers lequel l’attire une « sympathie fatale ». Ce n’est que cinq ans plus tard que, profitant d’un voyage à Paris, elle lui écrit enfin et contre toute attente, Montaigne lui donne rendez-vous pour le lendemain. On a beaucoup épilogué sur leur coup de foudre.  « Je ne regarde plus qu’elle au monde », confie Montaigne, évoquant aussi avec nostalgie « la véhémente façon dont elle (l’)aima et (le) désira longtemps »... Il lui offre même une bague en diamants ornée de deux initiales « M » entrelacées. Mais Montaigne a cinquante-cinq ans, il est marié et Marie n’a que vingt-trois ans et une mère qui la surveille. Quoi qu’il en soit, Montaigne va se rendre plusieurs fois, cette année-là, au château de Gournay pour rencontrer celle qu’il nomme désormais sa « fille d’alliance ». Leurs échanges intellectuels aboutissent à ce que Marie note sous la dictée toutes les dernières modifications que Montaigne souhaite effectuer dans ses Essais. Ils ne se reverront plus mais continueront à s’écrire. La même année, Marie écrit Le Promenoir de Monsieur de Montaigne, un roman allégorique où elle encourage les dames à s’instruire et à ne pas tomber dans « le pestilent désastre de dépendre d’autrui ».





A la mort de sa mère, Marie de Gournay, âgée de vingt-six ans, décide de réaliser sa vocation : elle part vivre seule à Paris, dans un but un peu extraordinaire pour l’époque : ne pas se marier, se consacrer à l’écriture et vivre de sa plume ! Lorsque Montaigne s’éteint, le 15 septembre 1592, en lui léguant sa célèbre bibliothèque, elle s’abandonne au désespoir : « J’étais sa fille, je suis son sépulcre, j’étais son second être, je suis ses cendres », écrit-elle. Mais Françoise de Montaigne, la veuve de l’écrivain, lui confie une mission : réaliser la première édition posthume des Essais. Marie se lance alors dans l’immense tâche, effectuant les corrections et ajouts souhaités par le célèbre écrivain et rédigeant une longue préface.

Son activité littéraire ne s’arrête pas là. Comme elle en avait rêvé, elle  devient femme de lettres ! Elle va écrire une quarantaine d’essais, un roman et publier une multitude de traductions d’auteurs latins. Elle écrit même, à l’usage du futur Louis XIII, un Abrégé d’éducation pour le prince souverain.

Pourtant, Marie de Gournay doit sans cesse lutter contre l’adversité.  Bien qu’elle fréquente de nombreux intellectuels de son temps, elle est souvent raillée pour son célibat et ses écrits où elle demande qu’on puisse reconnaître à la femme le statut d’écrivain. On dénigre aussi cette « femme savante » parce qu’elle réfute, dans certains de ses textes, les thèses de Montaigne, qu’elle juge, malgré son admiration, trop misogyne. Mais avec le temps, Marie apprend à se défendre et rédige des pamphlets contre ceux qui se moquent d’elle en la traitant de « vieille sybille ridicule ». Malheureusement, ses difficultés financières sont telles qu’elle est contrainte de travailler comme « écrivain fantôme », en prêtant sa plume à des personnalités de son époque. Admiratif de son courage, Richelieu lui accordera le privilège royal nécessaire à la publication de ses œuvres et la gratifiera, même momentanément, d’une pension royale mais elle passera l’essentiel de sa vie dans la pauvreté.

Ses deux ouvrages de références sont L’égalité des hommes et des femmes, dédié à la reine Anne d’Autriche, en 1622, et Le Grief des Dames, en 1626. Elle prône une égalité totale entre les sexes, demande l’accès des femmes à l’instruction et dénonce particulièrement les discriminations dans le domaine de la culture, en s’insurgeant contre ceux qui « dédaignent les femmes sans les ouïr et sans lire leurs écrits ».


Par son choix de vie et d’écriture coûte que coûte, sa détermination à devenir une écrivaine à l’époque où la culture est refusée aux femmes, Marie de Gournay fait figure de pionnière. Désolée de constater que son siècle ne la comprenait pas, elle espérait obtenir la reconnaissance de ses écrits « dans le futur ». C’est en partie ce qui s’est produit, puisque ses deux ouvrages principaux ont été enfin republiés au XXIe siècle, même s’il a fallu quatre cents ans pour les sortir des oubliettes...


Bibliographie:

-Marie de Gournay ou les témérités d'une quenouille, par Séverine Auffret, Arléa, 2008.

-Marie de Gournay, écrivaine indépendante, site histoireparlesfemmes, 2014.

-Le Combat savant de Marie de Gournay, Michèle Fogel, L'Humanioté, 2004.

Amin Maalouf à l'Institut français de Turquie

 

Un salon littéraire exceptionnel, animé par Yigit Bulut,  a eu lieu jeudi 28 avril 2021, sur Zoom, à l’Institut français d’Istanbul : une rencontre avec Amin Maalouf, si aimé en Turquie qu’il y a vendu deux millions de livres depuis 1995 ! Quel est donc le message que nous délivre le célèbre écrivain et académicien dans son nouveau roman,  Nos frères inattendus ?


Un roman métaphorique

Le roman Nos frères inattendus, paru en 2020 chez Grasset, traduit en turc par Ali Berktay aux Editions YKY, sous le titre Empedokles’in Dostları (Les Amis d’Empédocle), fait suite à l’essai Le Naufrage des civilisations (Grasset, 2019) dont il constitue le prolongement : « Ce sont deux livres qui viennent de la même inspiration », confirme l’auteur.

Le roman se passe sur une île où habitent séparément deux personnages un peu misanthropes, le narrateur, un dessinateur, et une romancière qui a voulu s’isoler du monde, lorsque survient une panne de courant qui leur fait craindre une guerre nucléaire. Mais ils découvrent qu’en réalité, un événement extraordinaire est en train de se produire : le président des Etats-Unis annonce que des négociations sont en cours avec une autre humanité venue de l’Antiquité, qui présente la caractéristique d’être supérieure technologiquement, en particulier en médecine, mais surtout, plus évoluée moralement et dotée d’une immense capacité de bienveillance ! Cette humanité, appelée « Les Amis d’Empédocle », qui nous démontre que toutes nos connaissances sont obsolètes, a vécu cachée à l’écart des êtres humains, n’a jamais voulu intervenir dans leurs affaires, sauf si les habitants s’égaraient au point d’être sur le point de sombrer… Le roman pose donc une question fondamentale : qu’arriverait-il au monde si une civilisation supérieure à la nôtre, non seulement du point de vue technologique mais surtout du point de vue moral, apparaissait ?



Qui était Empédocle ?

Empédocle était un philosophe présocratique, connu pour avoir refusé la royauté que lui proposaient les  habitants d’Agrigente.  Il a beaucoup inspiré les penseurs depuis le XIX siècle, en particulier par sa mort romanesque. La légende raconte, en effet, qu’il se serait suicidé en se jetant dans le cratère de l’Etna, en abandonnant ses sandales sur le bord.

« Les romans naissent des manquements de l’Histoire », disait Novalis

Selon Amin Maalouf, nous avons aujourd’hui tout le savoir de l’humanité au bout des doigts et tous les moyens de débarrasser l’espèce humaine des fléaux qui l’assaillent. Cependant, en dépit de cet extraordinaire développement économique, scientifique et matériel, nous n’avons pas progressé moralement. « On n’a pas réussi à organiser des relations harmonieuses entre les humains », regrette-t-il. Nous sommes dans un monde qui ne vit pas sereinement car il existe un hiatus entre ce formidable développement et l’évolution des mentalités. « J’aurais voulu que … la puissance matérielle soit soumise aux valeurs morales... », ajoute-t-il.

La publication de ce roman, écrit avant la pandémie, avait été retardée mais en le relisant, l’auteur a réalisé qu’il y avait concordance entre sa fiction et les événements. Car cette crise a été révélatrice de la réalité du monde, a prouvé que toutes les sociétés sont reliées ; les pays riches ont été autant affectés que les pays pauvres, tout ce qui arrive aux autres peut arriver chez nous. Mais en même temps, on s’est aussi rendu compte qu’on est toujours dans le « chacun pour soi », on l’a vu dans la crise des masques entre les pays européens…



L’espoir comme ultime bouée de sauvetage

Il y a des périodes où l’humanité n’arrive pas à trouver de solutions. Pourtant, elle a l’obligation d’en inventer une, sinon, comme le Titanic, elle heurtera un iceberg, coulera pendant que jouent les violons et ne trouvera la solution qu’après le naufrage. Amin Maalouf cite en exemple les « Lumières levantines », ce monde multiculturel qui a existé à Antioche, Alep, Izmir, Istanbul, Salonique ou Sarajevo mais qui a, en grande partie, disparu. L’univers unique de ces villes  incarnant la pluralité a été détruit, non par une volonté explicite mais plutôt par l’absence de volonté de préserver cette richesse. Personne n’a compris à quel point ces sociétés où juifs, chrétiens et musulmans vivaient en harmonie étaient importantes, jusqu’à ce qu’elles disparaissent… Car « les tentatives d’homogénéisation incarnent de fausses valeurs », commente-t-il ; à l’inverse, les pays qui traitent leurs minorités comme la majorité sont en bonne santé ;  ce qui est important dans un pays, c’est donc que chaque citoyen se sente pleinement citoyen…

En conséquent, il s’impose de rétablir l’espoir, en conservant le souci de ne pas avoir de populations ayant perdu foi en leur avenir. Mais d’où peut venir cet espoir ? « Il faudra imaginer un nouvel ordre mondial où chacun aura sa voie… rebâtir une idéologie qui ne repose pas sur la tyrannie d’une civilisation…  où toutes les cultures pourront se propager dans le monde », conclue le célèbre humaniste...



 Cet article a été publié le dimanche 2 mai 2021 dans Le Petit Journal de Turquie

https://lepetitjournal.com/istanbul/retour-sur-la-rencontre-avec-amin-maalouf-lif-de-turquie-304187 



samedi 22 mai 2021

Le Tambour du Ramadan dans Fenêtres d'Istanbul, vidéo, avril 2021

 


Istanbul, ville d'inspiration et de littérature... mai 2021


 

Victor Hugo, mort le 22 mai, le jour de la fête de sa muse…

 

Le célèbre poète français Victor Hugo était déjà très célèbre pour ses poèmes et ses pièces de théâtre quand, à la trentaine, en 1833, il fait connaissance une actrice, Juliette Drouet, qui joue dans sa pièce Lucrèce Borgia.

De cette première rencontre, marquée par un coup de foudre réciproque, va naître une liaison amoureuse qui durera 50 ans ! C’est pour elle que Victor Hugo, composera, sa vie durant, ses plus poignants poèmes d’amour. 

 « Mon âme à ton cœur s’est donnée, lui écrit-il.

-  Je fais tout ce que je peux pour que mon amour ne te dérange pas.

Je te regarde à la dérobée.  Je te souris quand tu ne me vois pas, » lui répond-elle.

 

Chaque année durant cinquante ans, Victor Hugo envoie le 22 mai, jour de la Sainte-Julie, une lettre d’amour à Juliette pour sa fête :

 

 « Cher doux ange, ma première pensée est pour toi. Je t’écris de mon lit en m’éveillant. Je commence ma journée comme je finirai ma vie, en t’envoyant mon âme. J’entends le tambour, tout le quartier est en rumeur, il fait le plus beau sommeil du monde, Paris se donne une fête, mais la vraie fête est dans mon cœur quand je songe à toi… » (Lettre du 22 mai 1848)

 


 Dès leur rencontre, Juliette va passer toute son existence dans l’ombre de Victor  Hugo. En effet, ce dernier, marié, continuera toujours à vivre avec son épouse et ses cinq enfants. Aussi Juliette habitera-elle tout le temps, au fil de nombreux déménagements, dans une rue proche de celle de son amant. Par amour pour lui, à sa demande, elle renonce au théâtre ! Elle accepte de ne plus porter de tenues trop voyantes et de ne plus sortir de chez elle, sauf en sa compagnie ! A quoi occupe-t-elle ses journées lorsqu’elle ne voit pas Victor ? Elle recopie les manuscrits du grand écrivain ! Elle sera toujours sa première lectrice et sa conseillère littéraire. Et elle lui écrit des lettres d’amour. Plusieurs par jour. Elle lui en adressera plus de 20000 !



Juliette Drouet endure tout. En particulier les multiples infidélités de son amant. Car les femmes, qui tombent amoureuses de Hugo rien qu’en lisant ses poèmes, ne cessent d’occuper la vie du poète. Il a même fait aménager au domicile conjugal une porte secrète pour y recevoir ses maîtresses. Plusieurs fois, Juliette le quittera. Mais Victor ira à chaque fois la rechercher en lui répétant une promesse solennelle : « Nos deux vies se sont soudées à jamais. » 

En 1851, lorsque Napoléon III prend le pouvoir, la vie de Victor Hugo, républicain et farouche opposant politique de l’empereur, est en danger. Toutes les forces de la police impériale sont à sa poursuite. Juliette le cache, lui procure un faux passeport et lui permet de passer la frontière. C’est elle aussi qui sauve la fameuse « malle aux manuscrits » contenant toutes les œuvres de Hugo. Et ce dernier prend, avec sa famille, la route d’un exil qui durera dix-neuf ans, sur l’île anglo-normande de Guernesey. Bien sûr, Juliette le suit dans ce petit morceau de terre perdu dans l’Atlantique et s’installe de nouveau dans une rue à côté de la sienne ! Elle ne le quittera Guernesey que lorsque, après la chute du Second Empire, son célèbre amant rentrera enfin en France.



Toute leur vie, Victor Hugo et Juliette ont tenu un cahier rouge appelé « Le livre de l’anniversaire » où ils ont chaque année écrit un texte célébrant l’anniversaire de « la nuit bénie », c'est-à-dire leur première nuit d’amour, le 16 février 1833. Ce jour-là, Victor Hugo avait noté :

 « Le 26 février 1802,  je suis né à la vie, le 16 février 1833, je suis né au bonheur dans tes bras. La première date, ce n'est que la vie, la seconde c'est l'amour. Aimer, c'est plus que vivre... »

 Et le 16 février 1883, il écrit : « Cinquante ans d’amour, c’est le plus beau des mariages. ».

 


Juliette mourra cette année-là, deux ans avant Victor.

Sur sa tombe, il fera graver l’épitaphe suivante :

 

« Quand je ne serai plus qu’une cendre glacée,

Quand mes yeux fatigués seront fermés au jour,

Dis-toi, si dans ton cœur ma mémoire est fixée :

Le monde a sa pensée, moi, j’avais son amour ! »

 

Quant à Victor, c’est bien un 22 mai, jour emblématique où, chaque année, il abreuvait Juliette de lettres d’amour, qu’il s’éteint en 1885..

 


 

mercredi 24 mars 2021

Orhan Pamuk : Les Nuits de la Peste. Veba Geceleri

L’évènement littéraire de ce début de printemps 2021 en Turquie est la sortie du roman d’Orhan Pamuk, Veba Geceleri, soit, Les Nuits de la Peste (pas encore traduit en français).

Le célèbre écrivain a publié ces derniers jours une série de vidéos dans lesquelles il présente sa nouvelle œuvre à ses lecteurs. C’est pourquoi j’ai écrit cette petite synthèse de ses commentaires pour ceux et celles qui ne parlent pas le turc…

Un roman sur une épidémie de peste

L'histoire se passe en 1901 dans l’île ottomane imaginaire de Minger, dont la population est moitié musulmane, moitié chrétienne, lors d’une épidémie de peste appelée « la troisième pandémie ».  Orhan Pamuk a voulu relier des événements historiques réels à des héros nés de son imagination. A partir de la deuxième moitié du roman, dit-il, le roman prend des allures de conte… Orhan Pamuk définit sa nouvelle œuvre comme un roman d’amour, un roman policier et un roman historique. Il pense qu’à ce titre, elle offre un dernier panorama de l’Empire ottoman.

Des héros imaginaires

Tous les héros du roman sont imaginaires et le romancier crée trois couples emblématiques de son histoire :

-Le préfet de l’île de Minger, Salih Pacha et sa maîtresse, Marika.

-Le jeune officier Kamil, natif de l’île, qui est tombé amoureux de Zeynep et souhaite l’épouser.

-La sultane Pakize, troisième fille du sultan Murat V enfermé au palais de Ciragan ; elle est mariée avec le spécialiste des quarantaines, le docteur Nuri, que le sultan Abdülhamit II, qui est aussi un des héros du roman (réel, celui-là), envoie sur l’île de Minger pour combattre la peste.

Orhan Pamuk explique qu’au-delà des faits de l’épidémie, son souci était de traduire le monde sentimental et spirituel des héros face à la pandémie. Car la force de l’amour va parfois se trouver en butte à la peur de la mort qui risque de se montrer plus puissante...

Les conditions d’écriture du roman : une pandémie survient alors qu’il était en train de décrire une pandémie !

« Ce que j’ai écrit dans mon roman était devenu vrai… »

Ce roman, auquel il pensait depuis quarante ans, lui a demandé cinq ans de travail. Il explique que lorsqu’il a commencé le livre, tout le monde lui demandait pourquoi il avait choisi ce sujet puisque les épidémies appartenaient au passé ; il répondait que l’on pouvait trouver des similitudes avec le monde moderne dans  la coercition exercée par les pachas pour imposer la quarantaine. 

Puis, l’apparition de la pandémie de Covid-19 l’a bouleversé ! Il travaillait depuis plus de trois ans sur un sujet qui lui était propre et soudain, le sujet lui échappait et devenait celui de tout le monde ! Il s’est alors vite rendu compte que la pandémie de Covid-19 renvoyait aux mêmes angoisses que celles qu’il décrivait dans son roman, comme les doutes sur l’origine de la maladie, la peur de la mort, le confinement forcé, le couvre-feu, les hôpitaux et les cimetières débordés… et il a donc retravaillé son roman en fonction de cette nouvelle expérience…

Ce que la pandémie de Coronavirus a apporté à son roman

Tout le monde lui a posé la question :

-Est-ce que l’épidémie de Coronavirus t’a appris quelque chose ?

-Oui, a-t-il répondu, la peur, la peur de la mort !

« J’avais compris cette peur en lisant les livres mais je ne l’avais pas vraiment imaginée. Car on n’apprend pas la peur de mourir pendant une épidémie dans les livres… A cause de cela, j’ai terminé le roman dans l’émotion et l’urgence », explique-t-il.



 Une immense recherche documentaire

Le grand écrivain qualifie la multitude de recherches qu’il a dû effectuer par la métaphore de « creuser un puits avec une aiguille ». Il a consulté des livres d’histoire, de science, des brochures, des journaux de cette époque. Il explique qu’il a acquis des connaissances « encyclopédiques » sur les efforts de modernisation de l’Empire ottoman dans ses institutions, en parlant de sujets peu connus, la pharmacie, le fonctionnement des anciens hôpitaux, postes, prisons, forteresses. Il y analyse aussi les relations entre deux frères qui ont chacun été sultan,  Murat V et Abdulhamid II, qui, au début, s’entendent bien mais ensuite deviennent ennemis, l’un tenté par la modernisation, l’autre par le conservatisme.

Orhan Pamuk a aussi consulté d’anciennes photos et cartes postales. Rappelant que dans sa jeunesse, il voulait devenir peintre, il a réalisé de multiples dessins, celui de la couverture et d’autres, qu’il utilise dans ses vidéos.

Que peut-on observer de semblable ou de différent dans les pandémies ?

Au final, quelle que soit l’époque et le lieu, les réactions des populations face à l’épidémie sont semblables. D’abord, les états n’acceptent pas et nient, et pendant ce temps, l’épidémie s’est répandue ; ensuite, arrivent les rumeurs, les commérages, les accusations, les soupçons des complotistes ; les états se replient sur eux-mêmes et favorisent la nationalisme ; puis, les commerçants se dressent contre le confinement qui ruine leurs affaires et des émeutes éclatent, si bien que le pouvoir devient de plus en plus autoritaire et répressif. Mais bien sûr, la grande différence est qu’une personne sur trois mourait de la peste, les médecins ne tentaient que de soulager les douleurs alors que la plupart des gens qui attrapent le Covid 19 guérissent. Cependant, la peur est le point commun. C’est parce que les gens ont peur qu’ils obéissent aux ordres de confinement. D’ailleurs, Orhan Pamuk plaisante en déconseillant aux lecteurs de lire son livre la nuit, car, d’un certain côté, c’est un roman d’épouvante !

Le livre renferme-t-il des allusions politiques ?

Citation résumée : « Je  n’ai pas hésité à faire des renvois à la politique d’aujourd’hui mais le  but d’un roman sur lequel vous avez réfléchi pendant 40 ans ne peut pas être de critiquer le gouvernement du moment ! » commente-t-il. Certes, il est possible que, sur la colère contre le pouvoir à cause du couvre-feu, le nationalisme, la laïcité, l’islam politique, la liberté d’expression, les minorités, on puisse trouver des ressemblances avec la situation d’aujourd’hui mais ce n’est pas le but du roman... »

 

*

On attend avec impatience la traduction en français. Il ne fait aucun doute que le roman Les Nuits de la Peste, s’annonce comme un chef-d’œuvre et qu’il se rangera dans les grands classiques utilisant l’épidémie comme allégorie, comme La Peste de Camus, Le Hussard sur le toit, de Giono ou Némésis, de Philipp Roth…

 

Cet article a été publié aussi le 28 avril 2021 dans Le petit Journal de Turquie https://lepetitjournal.com/istanbul/actualites/decouvrez-les-nuits-de-la-peste-le-nouveau-roman-dorhan-pamuk-303986: